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Le marxisme et les syndicats(Suite de la conférence donnée le 10 janvier 1998, par David North lors des classes internationales d'été ayant pour thème Le marxisme et les problèmes fondamentaux du 20e siècle, organisées par le Socialist Equality Party d'Australie du 3 au 10 janvier 1998 à Sydney.) De plus, le principal but de cette conférence n'était pas de donner autant d'exemples que possible de la trahison des syndicats. Plutôt, le thème essentiel qui la sous-tend, comme pour les autres conférences données cette semaine, est le rôle dans l'histoire de la conscience socialiste et de la lutte pour la développer dans la classe ouvrière. C'est là la signification du parti révolutionnaire marxiste. Même si le militantisme syndicaliste renaissait spontanément, et un tel développement serait impensable sans une explosion de rebellions de la base contre les vieilles organisations bureaucratiques, un tel mouvement prometteur n'adoptera des politiques révolutionnaires qu'en conséquence du travail indépendant du parti marxiste pour développer une conscience socialiste au sein de la classe ouvrière. Il est aussi important de noter que les mêmes qui insistent sur le fait que l'autorité des syndicats est incontestable, s'opposent à la lutte pour gagner la classe ouvrière au marxisme. Cette question est le plus explicitement exprimée dans des écrits récents de Cliff Slaughter, qui dénonce ces marxistes (il veut parler du CIQI) «qui continuent à penser qu'ils ont pour mission d'élever les consciences, d'intervenir politiquement et de politiser les soulèvements spontanés de la classe ouvrière... » Je ne crois pas exagérer en disant qu'il y a une composante d'intention criminelle dans ces mots. Nous approchons la fin d'un siècle qui a été témoin des pires tragédies historiques. Le prix payé en sang par l'humanité, pour les échecs et les trahisons de plusieurs luttes révolutionnaires est incalculable. Les victimes tombées à cause des conséquences politiques des révolutions trahies se comptent par centaines de millions. Même au cours des dernières années, nous avons vu les résultats humiliants et fatals de la désorientation des masses soviétiques. Et encore, face à cette désorientation politique universelle, Slaughter dénonce ceux qui cherchent à résoudre cette désorientation sur la base de la science socialiste. Les intérêts de la classe ouvrière sont bien mal servis par les glorifications cyniques de sa spontanéité, c'est-à-dire de son niveau de conscience d'aujourd'hui et de ses formes organisationnelles actuelles. Pour Slaughter et les autres ex-marxistes du même acabit, embrasser la spontanéité de la classe ouvrière ne sert qu'à couvrir leur propre collaboration avec les bureaucraties ouvrières et syndicales. Nous ne nous excusons pas d'insister sur le fait que l'avenir de la classe ouvrière dépend de la force de nos interventions politiques et du succès de nos efforts pour élever sa conscience. Nous nous basons sur les fondations dégagées par les grands fondateurs et représentants du socialisme scientifique. Nous rejetons la déclaration de Slaughter pour être une répudiation des principes essentiels qui ont constitué la raison d'être du mouvement marxiste depuis son origine. Le prolétariat est le sujet historique actif du projet socialiste. Mais le socialisme n'est pas sorti, et ne pouvait pas sortir directement de la classe ouvrière. Il a, façon de parler, sa propre histoire intellectuelle. Marx n'a jamais prétendu que sa conception des tâches historiques du prolétariat se conformait à quelque «opinion publique» générale que peut avoir la vaste majorité des travailleurs à n'importe quel moment de son développement. Il est absurde même de suggérer que Marx, le plus grand esprit depuis Aristote, ait dévoué toute sa vie à formuler des idées qui ne feraient que reproduire ce qu'un travailleur moyen pourrait penser par lui-même. En 1844, Marx écrivait: «La question n'est pas ce que tel ou tel autre prolétaire, ou même l'ensemble du prolétariat, considère actuellement comme son but. La question est ce qu'est le prolétariat, et à partir de son être, qu'est-ce qu'il devra réaliser. Son but et son activité historique sont visiblement et irrévocablement préfigurés dans la situation de sa propre vie aussi bien que dans toute l'organisation de la société bourgeoise d'aujourd'hui.» [17] Si la conscience socialiste était générée par le développement spontané de la lutte de classe, alors il y n'y aurait plus de raison d'organiser ces classes internationales. Quel besoin y aurait-il pour des conférences sur l'histoire, la philosophie, l'économie politique, la stratégie révolutionnaire et la culture si la classe ouvrière, à l'aide de ses organisations de masse actuelles et au niveau présent de conscience historique et politique, pouvait automatiquement s'affranchir des tâches que lui pose le développement de la crise mondiale du capitalisme? Considérons l'arrière-plan politique sur lequel ces classes sont organisées. Au moment même où nous nous rencontrons, les économies du Sud-est asiatique plongent dans la confusion la plus extrême. Presque du jour au lendemain, l'existence de centaines de millions de personnes est en péril. En Indonésie, la valeur de la monnaie est tombée de 22% avant-hier. Depuis six mois, le roupie indonésien a perdu presque 80% de sa valeur. Le FMI demande un régime d'austérité brutale, et dans de telles conditions, l'éruption de luttes sociales massives est inévitable. Toutefois, ce qui sortira de ces luttes ne dépend-il pas de l'assimilation par la classe ouvrière indonésienne des leçons tragiques de sa propre histoire, un autre chapitre cauchemardesque de l'histoire du 20e siècle? Ne serait-il pas nécessaire de revoir avec les travailleurs, les étudiants et les intellectuels indonésiens les événements de 1965-66, c'est-à-dire comment le plus grand Parti Communiste après celui de l'URSS et de la Chine, fort de plus d'un million de membres, a été impuissant devant le coup d'État de Suharto. Plus d'un demi-million de personnes ont été assassinés par la contre-révolution. Les rivières de Sumatra et de Bali étaient bloquées par les corps des victimes. Les prisonniers arrêtés suite au coup de Suharto ont continué à être exécutés jusque dans les années 90. Il y en a des questions et des problèmes sans réponses qui sont restés dans le noir! Les leçons stratégiques de cette période constituent la base sur laquelle les travailleurs indonésiens doivent obtenir leur revanche pour les crimes de la bourgeoisie indonésienne, soutenue par l'impérialisme américain, et aussi l'australien, je dois dire. La question ici n'est pas un problème indonésien, mais
une tâche à l'échelle de l'histoire mondiale. C'est
ainsi que ces classes se terminent, comme elles ont commencé, en
insistant sur le fait que l'avenir de l'humanité du 21e siècle
dépend de l'assimilation des leçons des expériences
stratégiques de l'histoire du 20e siècle. Et si nous devions
en quelques mots seulement énoncer la principale conclusion auquel
nous sommes arrivés à la fin de notre examen de ce siècle
troublé, c'est bien que le destin de l'humanité est lié
de façon inextricable avec la lutte pour le développement
de la conscience et de la culture socialiste au sein de la classe ouvrière
internationale, une lutte qui trouve son expression politique essentielle
avec la construction du Parti Mondial de la Révolution Socialiste.
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